
La modernité de l’esthétique traditionnelle
Le parapluie « janome » : quand le papier japonais protège même des averses
Visiterle Japon
Culture Design Tradition Ville- English
- 日本語
- 简体字
- 繁體字
- Français
- Español
- العربية
- Русский
La fabrication du parapluie « œil de serpent »
Les baleines sont fabriquées dans une variété de bambou appelée madake, souple et très résistante au vent et aux intempéries, qui ne casse pas, même taillé très fin. Même à Gifu, les artisans capables de tailler les baleines de parapluies sont devenus très rares, mais nous avons trouvé un artisan-baleinier de plus de 80 ans pour nous faire une démonstration de sa technique.
La taille des baleines consiste d’abord à peler un tronçon de bambou, réduire les cloisons et les nœuds, avant de le fendre. Un tronçon d’environ 27 cm de circonférence peut ainsi donner 100 baleines de 3 mm d’épaisseur, c’est-à-dire suffisamment pour 2 parapluies janome. La principale différence entre un parapluie japonais et un parapluie occidental est que le papier de la couverture d’un parapluie japonais se replie vers l’intérieur et non pas vers l’extérieur. Le parapluie refermé retrouve alors la forme originale du tronçon de bambou. C’est pourquoi les baleines sont rangées et assemblées dans l’ordre naturel dans lesquelles elles sont sorties du tronçon.
L’artisan-baleinier au travail. Réduction du cloisonnage intérieur (photo de gauche) ; le tronçon est fendu en baleines de 3 mm d’épaisseur, qui sont ensuite percées dans le sens de la largeur avec un foret (photo du milieu) ; les baleines sont ensuite rectifiées (photo de droite).
Concrètement, comment fait-on ? En premier lieu, une marque est tracée avec une pointe sur l’extérieur du tronçon, avant de le fendre. Il suffira donc de rassembler toutes ces marques pour retrouver la ligne d’origine du bambou. Les baleines, montées dans l’ordre sur une très fine tige en bambou, sont alors transmises à l’artisan de l’étape suivante.
Les baleines sont rangées dans leur ordre naturel, garanti par la marque tracée sur la largeur du tronçon. Puis la « main » complète, pour un parapluie complet, est montée sur une fine tige de bambou, avant séchage à l’air libre et transmission à l’atelier suivant.
À l’étape suivante, les baleines et sous-baleines sont assemblées. Les pièces essentielles du parapluie sont les deux « pivots » ou rokuro, qui, eux, sont en bois. Celui qui se trouve à la pointe du parapluie s’appelle, en terme technique français, la « noix » (atama-rokuro ), et celui qui coulisse sur le manche est appelé le « coulant » (temoto-rokuro). C’est sur ce dernier que viendront s’assembler les sous-baleines. Les trous, percés au niveau d’un nœud du bambou, permettent d’assembler les baleines et les sous-baleines sur leur pivot respectif, réalisant ainsi les articulations du parapluie, grâce auxquelles celui-ci pourra s’ouvrir et se fermer sans difficulté.
Les pivots (rokuro) sont les pièces essentielles du parapluie japonais.
Chaque parapluie comprend deux pivots, la « noix » à la tête du parapluie, et le « coulant » à la main.
L’assemblage des baleines sur la « noix » demande beaucoup de minutie.
Une fois la structure assemblée, vient le tour de l’artisan spécialisé dans la couverture, c’est-à-dire celui qui va coller le papier sur les baleines. Quand le parapluie est enfin habillé de papier japonais, il est déjà beau comme une fleur. Les plis entre les baleines sont marqués vers l’intérieur. Le moindre défaut dans l’axe des pliures empêchera le parapluie de se refermer en beauté.
Ensuite, le parapluie doit sécher au soleil, puis il est huilé pour être imperméabilisé. Il lui faut 2 jours pour sécher en été, et 3 jours en hiver. Les côtes des baleines sont ensuite laquées. Le parapluie est enfin terminé !
Couverture du parapluie : les baleines ouvertes au maximum, les quartiers de papier japonais prédécoupés sont encollés et fixés. Les articulations baleines/sous-baleines et le coulant sont également renforcés de papier japonais.
Les jeunes artisans travaillent dans l’atelier du grossiste Sakaida Eikichi Honten. « Même après 15 ans de métier, on est encore un apprenti. »
(Article publié à l'origine en japonais. Reportage et text : Mutsuta Yukie. Photos : Ôhashi Hiroshi. Photo de titre : des parapluies janome de différentes couleurs laissés séchés au soleil)