Comment vivre pour soi-même ?

Écouter la colère profonde de son cœur, une nécessité absolue pour être heureux

Société

Faut-il considérer la colère comme un sentiment détestable ? Tout comme le chagrin, elle fait partie des émotions enfouies au plus profond de notre cœur. Mais si on leur prête l’oreille attentivement, elles sont réellement capables de nous libérer de nos souffrances, et de libérer le plaisir et la joie. Tel est le thème du message que le psychiatre japonais Izumiya Kanji nous convie à lire.

L’importance capitale de la colère

Au fil de ma pratique de psychiatre, j’ai découvert qu’une grande partie des patients dont la porte du cœur est close ont été élevés par des parents fortement enclins à la colère superficielle. De ce fait, ils ont fini par considérer cette émotion comme une chose détestable à laquelle ils ne veulent absolument pas se laisser aller, quelle que soit la forme qu’elle prenne. C’est sans doute ainsi qu’ils ont fermé la porte de leur cœur et ce faisant, posé un couvercle hermétique sur le puits de leurs émotions.

Comme le montre le diagramme précédent, empêcher la colère de sortir, c’est aussi laisser enfouir toutes les émotions profondes qui se trouvent plus bas et jouent un rôle si important dans la vie des êtres humains.

Une fois que leurs affects sont bloqués au fond leur cœur, les gens ne ressentent plus rien quoi qu’ils fassent, qu’ils voient ou qu’ils entendent. Ils sont incapables d’accéder au bonheur de vivre et tombent dans un processus de dépersonnalisation. Ils ont alors l’impression de vivre leur vie de l’extérieur. Ils me décrivent souvent l’impression de voir le monde extérieur à travers un léger voile, ou de le voir défiler comme une sorte de diaporama.

Il existe une solution pour sortir de cette impasse. Elle consiste à ouvrir la porte de son cœur et à se débarrasser en même temps de ses préjugés contre la colère, en l’occurrence celle qui se trouve tout en haut du puits des émotions. Les patients présentant ce syndrome doivent comprendre que ce qui les a traumatisés, c’est la colère de type superficiel qu’ils ont vue chez leurs parents, et que la colère profonde venue du cœur est une forme d’amour merveilleuse.

Afin d’éviter tout malentendu, je tiens à préciser qu’ouvrir la porte du puits des émotions pour laisser sortir sa colère profonde ne signifie en aucun cas qu’on puisse la déverser sans discernement autour de soi. Le cerveau doit jouer son rôle de régulateur de nos interactions avec la société en identifiant ce type d’affect en tant que tel, et en décidant s’il faut ou non les exprimer par des mots et des actes.

Les émotions que l’on garde enfouies au fond de son cœur risquent de toute évidence de se transformer en frustration. Je recommande donc vivement de les coucher par écrit chaque fois que le cerveau décide de ne pas les exprimer, plutôt que de se contenter de les laisser à l’intérieur. C’est ce que j’appelle les « notes pour vider le cœur », notes qui ne sont d’ailleurs pas destinées à être lues par d’autres personnes. Le seul fait d’exprimer ses émotions profondes par des mots et de les écrire procure un immense soulagement.

Tout au long de son histoire, l’humanité a eu recours à la colère profonde en tant que source d’énergie pour combattre le mal sous ses différentes formes, à commencer par la discrimination, les abus et les règles sociales injustes. Et ces luttes alimentées par la colère ont donné de merveilleux résultats. Mais cela n’a pas pour autant empêché le préjugé « mieux vaut ne pas se mettre en colère » de faire son chemin parmi nous.

Le refoulement de la colère profonde met les gens dans un état de castration psychologique qui les prive du bonheur de vivre. Il leur fait perdre le pouvoir de s’opposer à ce qui est injuste et irrationnel et d’empêcher le mal de dominer le monde.

C’est pourquoi il faut absolument que chacun d’entre nous reconsidère le sens et l’importance de la colère profonde.

(D’après un article en japonais du 25 avril 2018. L’illustration du titre est de Okada Mika. Elle représente, de gauche à droite, les quatre « émotions profondes » d’après le diagramme d'Izumiya Kanji : la colère, le chagrin, la joie et le plaisir.)

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psychanalyse développement personnel

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