Le secret du produit « qui vend »

Spécialités provinciales : de nouvelles tendances

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Kitamura Mori [Profil]

Nous vous parlerons aujourd’hui de ces « omiyage » de province qui innovent : les Sachi no kowake (« spécialités du cru en petites portions ») de la préfecture de Toyama, et les Ikiteiru Nori, (« Algues Nori vivantes ») des algues fraîches séchées de Tokushima. Leur succès résulte d’un refus du moindre compromis tant sur la qualité que sur le potentiel de la production locale.

Un défi

Fin 2011, j'ai visité Tokushima et chez un pêcheur algues j’ai goûté des algues nori fraîchement moissonnées. Les algues étaient dressées dans un saladier, arrosées d’une sauce faite d’un jus d’orange amère pressée, sucre et sauce du soja. On tourne rapidement. J’ai découvert un goût absolument différent de toutes les algues que j’avais jamais essayées. Le « parfum de l’océan », comme on dit, mais l’expression ne lui fait pas justice : c'était l’essence même de l’océan.

Quand M. Tanaka a dit aux pêcheurs d’algues qu'il voulait vendre les algues fraîches, ils se sont moqués de lui. Les algues commencent à se gâter quelques heures après avoir été moissonnées ; voilà pourquoi elles sont immédiatement envoyées dans les ateliers de transformation qui les sèchent et les conditionnent sous forme de feuilles.

Depuis des décennies les principales compagnies et laboratoires de recherche de l'université ont essayé de trouver la solution au conditionnement des algues fraîches, mais personne n’avait encore réussi. Comment une petite compagnie d’une vingtaine d’employés, sans aucune expérience dans le traitement de denrées alimentaires a-t-elle été capable de mettre le doigt sur la solution que tout le monde cherchait ?


Les Ikiteiru Nori, vendues 1050 yens le sachet empaqueté à la main est livré congelé.

Le plus grand n’est pas toujours le meilleur

M. Tanaka me raconte que sa méthode de recherche a simplement consisté à « tester chaque possibilité imaginable ». Fondamentalement, trois variables étaient à considérer : la température à laquelle congeler les algues, la vitesse du processus de réfrigération, et le pourcentage d’humidité des algues. En testant chaque combinaison de ces variables, les membres du projet furent capables d'arriver à la méthode de conservation optimale.

La volonté de procéder à un nombre de tests qui pouvait apparaître comme insensé, voilà ce qui a fait la différence entre Spec Lab et les grands fabricants. Il n’est pas si rare au Japon de voir de petites entreprises développer des produits qui rendent jaloux les plus grands groupes industriels. À mon avis, le secret de leur succès réside dans leur niveau d’implication. Les petites entreprises choisissent parfois de pousser fort sur un projet, alors même que les chances de succès peuvent paraître minces.

1000 yens pour un sachet d’algues peut paraître un prix assez élevé. Et, pour être honnête, c'était ma réaction initiale. Mais les Ikiteiru Nori sont quelque chose de spécial : ce sont tout bonnement les seules algues fraîchement moissonnées disponibles sur le marché. Une année à peine après leur apparition, le produit a déjà gagné une solide réputation comme une spécialité de Tokushima, comme le prouvent les commandes en nombre, non seulement d’individus mais également de restaurants fameux de Kyoto et Tokyo.

Le point commun entre Sachi no Kowake et Ikiteiru Nori est d’avoir cherché leur fortune près de leur maison. Au lieu de compter sur les consultants connus ou les chefs célèbres pour créer un omiyage, les régions commencent à se rendre compte qu’un simple petit tour de main à leurs spécialités locales peut suffire à leur faire retrouver leur vigueur.

 (D’aprés un original écrit en japonais. Photographies de Kawai Satoshi [Sachi no Kowake], Kitamura Mori [point de vente Sachi no Kowake], et Otaka Kazuyasu [Ikiteiru Nori]. )

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Kitamura MoriArticles de l'auteur

Né en 1966 à Toyama. Après avoir passé un diplôme de la Faculté de droit de l’Université Keiô, il rejoint la société de presse Nikkei Home Publishing en 1992. Il effectue depuis lors quantité de tests de consommation, à commencer par la vérification de la qualité de l’hébergement dans les hôtels en tant que rédacteur pour Nikkei Adoré, Nikkei Trendy et autres magazines. Il est rédacteur en chef de Nikkei Trendy de 2005 à mars 2008, date à partir de laquelle, en tant que « journaliste produits », il porte haut la devise : « tout produit susceptible d’être acheté par les consommateurs sera évalué ». Il recueille activement des informations en province, fait des conférences et écrit des articles. Il teste ainsi des dizaines de produits et services par mois, se rend incognito dans les hôtels et les restaurants au Japon et même à l’étranger. Chargé des cours en ligne en théorie du marketing informatique pour la Cyber-Université, créée entre autres par Softbank.

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