L’énergie nucléaire confrontée à un tsunami de litiges

Société

Shizume Saiji [Profil]

Le 11 mars 2011, un séisme de magnitude 9 a déclenché un tsunami qui a mis hors service le système de refroidissement de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, provoquant un accident catastrophique dont les retombées continuent de se faire sentir sept ans plus tard. Le reporter scientifique Shizume Saiji examine ici les suites juridiques de la fusion des réacteurs, depuis les plaintes déposées contre l’État et l’opérateur de la centrale jusqu’au foisonnement d’initiatives visant à l’arrêt définitif des activités nucléaires au Japon.

Statut des réacteurs nucléaires japonais en état de fonctionner

Nom de la centrale Nombre de réacteurs État (février 2018)
1 Tomari 3 Arrêt
2 Higashidôri 1 Arrêt
3 Onagawa 3 Arrêt
4 Fukushima Daini 4 Arrêt
5 Tôkai 1 Arrêt
6 Kashiwazaki-Kariwa 7 Arrêt
7 Hamaoka 3 Arrêt
8 Shika 2 Arrêt
9 Tsuruga 1 Arrêt
10 Mihama 1 Arrêt
11 Ôi 2 Arrêt
12 Takahama 4 2 en activité, 2 en arrêt
13 Shimane 1 Arrêt
14 Ikata 3 Arrêt
15 Genkai 3 Arrêt
16 Sendai 2 1 en activité, 1 en arrêt

Note : les six réacteurs de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi ont été mis hors service de 2011 à 2014).

Des avocats en mission

Me Kawai Hiroyuki et Me Kaido Yûichi n’ont pas attendu l’accident de Fukushima pour devenir des figures de proue du combat contre l’énergie nucléaire. Au lendemain de la catastrophe, ils ont fondé le Réseau national des avocats dans les procès contre les centrales nucléaires, un groupe de juristes qui intente des actions en justice contre les installations nucléaires pour le compte de citoyens et autres plaignants japonais.

Les deux avocats représentent aussi les actionnaires de Tepco, qui réclament aux anciens dirigeants de la compagnie 5 500 milliards de yens de dommages et intérêts, un montant jusque-là inégalé. Outre cela, en tant qu’avocats des Demandeurs dans les poursuites pénales liées à la catastrophe nucléaire de Fukushima, Me Kawai et Me Kaido travaillent aux côtés du ministère public dans le cadre du procès de trois dirigeants de Tepco, qui présente des similitudes avec les poursuites civiles en termes d’arguments, de preuves et de témoignages.

Ceci étant, on s’attend à ce que le procès – officiellement ouvert en juin dernier et censé se poursuivre au moins jusqu’à la fin de l’été prochain – fasse l’objet d’une gigantesque couverture médiatique au printemps, quand va commencer l’audition des témoins, dont plus de 20 sont attendus. Ce procès fait aussi appel à un énorme volume de pièces à conviction, notamment des enregistrements d’interviews menées par un organisme public, la Commission d’investigation sur l’accident survenu à la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, ainsi qu’un nombre incalculable de pages de courrier électronique, de mémos internes, de procès-verbaux de réunions et de rapports divers. Cette masse d’information apportera-t-elle un nouvel éclairage sur les facteurs humains à l’œuvre derrière l’accident de Fukushima ? La nation va surveiller de près la suite des événements.

(D'après un original en japonais du 19 février 2018. Photo de titre : des plaignants devant le tribunal du district de Fukushima le 10 octobre 2017. Ce dernier a convenu au cours du procès que Tepco et l’État avaient tous deux fait montre de négligence concernant la catastrophe de Fukushima. Jiji Press)

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Shizume SaijiArticles de l'auteur

Reporter scientifique, Kyodo News. Né dans le département de Chiba en 1973. Entre à Kyodo News en 1996. Nommé éditeur adjoint aux questions nucléaires en 2017. Effectue de nombreux reportages sur l’énergie nucléaire, la préparation aux séismes et l’accident de Fukushima Daiichi. Auteur de la série d’articles Hyôryû suru sekinin : Genshiryoku hatsuden o meguru rikigaku o ou (Une responsabilité à la dérive : comprendre la dynamique du nucléaire) publiée dans le mensuel Kagaku (Science).

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