Le « divorce posthume », une déclaration d’indépendance des femmes

Société

Les divorces posthumes, qui dissolvent légalement les liens de parenté créés par le mariage après la mort d’un conjoint, sont en augmentation. L’affaiblissement de la conscience des femmes mariées de faire partie de le ie [mot qui signifie à la fois « maison » et « famille »] de leur époux, et la détermination des femmes à ne pas vouloir la charge de leurs beaux-parents dépendants y sont pour beaucoup.

Partager la tombe de son époux n’est plus d’actualité

Dans le Japon d’aujourd’hui, où la notion d’intégration à la famille du conjoint a perdu de son importance, un autre changement est en train de se produire. Il concerne la conception de la tombe. À l’époque où la notion d’appartenance à la famille de mariage était plus forte, il était normal qu’une femme mariée soit inhumée dans le tombeau de celle-ci. Mais ces derniers temps, un nombre croissant de femmes choisissent de ne pas le faire parce qu’elles ne s’entendent pas avec leur époux ou leurs beaux-parents, ou encore parce qu’elles ne souhaitent pas imposer à leurs enfants le fardeau de l’entretien de cette tombe. Ce serait une des raisons qui les conduisent à envisager un divorce posthume.

Selon une enquête réalisée en 2009 par Dai-ichi Life Research Institute, la réponse la plus fréquente chez les hommes à la question « où souhaitez-vous être enterré ? » était « le tombeau familial » à 48,6 %, alors qu’elle n’était choisie que par 29,9 % des femmes.

En 2014, une autre enquête du même institut de recherche auprès de personnes mariées âgées de 60 à 79 ans montrait qu’à la question : « les époux doivent-ils partager la même tombe ? », 12,6 % des hommes choisissaient la réponse « pas nécessairement » ou « non je ne pense pas », mais le pourcentage équivalent chez les femmes était de 23,1 %. 64,7 % des hommes ayant participé à cette enquête indiquaient qu’ils souhaitaient partager la tombe de leur épouse, contre seulement 43,7 % des femmes. Les hommes semblent plus adhérer à cette vision d’une tombe partagée que les femmes.

La demande de tombes indépendantes pour les femmes progresse en liaison avec le divorce posthume. Cela reflète l’évolution de leur conscience, ainsi que leur plus grande autonomie financière et mentale. De plus, le nombre d’options n’imposant pas de charges à cet égard aux enfants a augmenté ces dix dernières années : tombes collectives « indéfiniment » entretenues par des temples, plantation d’arbres au lieu de pierres tombales, columbariums, etc. D’ailleurs, on commence à entendre parler de l’expression hakatomo (« compagnons de tombe »), qui partagent une même tombe entre amis. Ainsi, des cimetières qui acceptent une tombe partagée par des personnes sans lien de parenté sont de plus en plus nombreux.

Le Japon est confronté aux nombreux problèmes liés au vieillissement démographique le plus avancé du monde, à commencer par les soins à apporter aux personnes âgées dépendantes. La progression des divorces posthumes, tout comme l’évolution des idées sur la conception d’une tombe, surgit comme une de ses conséquences. N’est-elle pas une déclaration d’indépendance des Japonaises, vis-à-vis de la vision contraignante de l’ancien système de la famille-maison ?

(Photo de titre : PIXTA)

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