Les leçons de la crise financière de 1997 au Japon

Économie

Karube Kensuke [Profil]

L’économie japonaise reste sous l’emprise de la déflation et de la croissance faible, une situation que l’on peut faire remonter à 1997 et à la contraction brutale de l’économie provoquée par la crise financière survenue cette année-là. L’article qui suit, rédigé deux décennies plus tard, revient sur ce qui s’est réellement passé en novembre 1997.

La lenteur de réaction des autorités a laissé de profondes blessures

Les faillites ont continué en 1998, avec celles de la Banque de crédit à long terme du Japon et de la Nippon Credit Bank. Quelles leçons devons-nous tirer de la crise financière amorcée en 1997 ? Un ancien fonctionnaire du MoF a déclaré ceci : « Les faillites, que l’on cherchait jusqu’alors à éviter à tout prix, sont finalement devenues réalité. Celle de Sanyô Securities, au début du mois de novembre, a été particulièrement douloureuse, du fait des défauts de paiement sur le marché de l’argent au jour le jour et de la restriction brutale du crédit qu’elle a provoqués. Je ne pense pas que la méthode consistant à rechercher un atterrissage en douceur en prenant le contrôle des établissements financiers en difficultés tout en encourageant la croissance économique était erronée. Pourtant l’économie s’est détériorée après avoir plafonné au milieu de l’année 1997. Le Japon a apporté la preuve des blessures profondes et durables qu’un atterrissage financier brutal peut infliger à une économie. »

Le sentiment que le gouvernement a attendu trop longtemps avant d’injecter des fonds publics est fortement ancré. Tanaka Takayuki, un professeur de l’Université Senshû ayant travaillé antérieurement à la Banque de crédit à long terme du Japon, parle en connaissance de cause lorsqu’il déclare : « Le Japon aurait dû injecter sans délai de l’argent dans les banques dès l’éclatement de la bulle spéculative, comme les États-Unis l’ont fait en réaction à la crise financière mondiale de 2008. »

Chronologie des événements financiers consécutifs à l’éclatement de la bulle spéculative

1989 Décembre L’indice Nikkei enregistre un record historique à 38 915,87.
1994 Décembre La Banque du Japon annonce la création d’une nouvelle banque pour remédier aux difficultés financières des associations de crédit Tokyo Kyôwa et Anzen.
1995 Janvier Grand tremblement de terre de Hanshin-Awaji.
Août Les autorités préfectorales du département d’Osaka ordonnent à l’association de crédit Kizu de suspendre ses activités.
Décembre Le gouvernement décide d’injecter 685 milliards de yens d’argent public pour se débarrasser des sociétés spécialisées dans le prêt au logement.
1997 Avril Le ministère des Finances ordonne à Nissan Mutual Life Insurance (la première société d’assurance à faire faillite depuis la fin de la guerre) de suspendre ses activités.
Juin Entrée en vigueur de la révision de la Loi sur la Banque du Japon.
Novembre La société de titres Sanyô Securities demande le bénéfice du règlement judiciaire au titre de la Loi sur le redressement des entreprises.Faillite de la banque Hokkaidô Takushoku.La société de titres Yamaichi Securities décide de cesser ses opérations.Faillite de la banque régionale Tokuyô City Bank (basée à Sendai).
1998 Février Entrée en vigueur d’une loi permettant les injections de fonds publics.
Juin Fondation de l’Agence de supervision financière (prédécesseur de l’Agence des services financiers).
Octobre Le gouvernement déclare que la Banque de crédit à long terme du Japon est insolvable et décide de la nationaliser provisoirement.
Décembre Le gouvernement entérine la faillite de la Banque de crédit du Japon.
(D’après un original publié en japonais le 30 octobre 2017. Photo de titre : une longue file de clients devant la succursale de Shinjuku de la maison de titre Yamaichi Securities à Tokyo le 25 novembre 1997. Jiji Press)

Tags

crise finance

Karube KensukeArticles de l'auteur

Journaliste et professeur à la faculté d’économie de l’Université Teikyô. Né à Tokyo en 1955. Diplômé de l’Université Waseda, il est entré chez Jiji Press en 1979. Avant d’occuper son poste de professeur depuis avril 2020, il a assumé successivement les fonctions de chef du bureau de Washington, chef du bureau de New York, rédacteur en chef adjoint et chroniqueur en chef. Parmi ses ouvrages, Nichibei kome kôshô (Les négociations nippo-américaines sur le riz) et Kenshô bubble shissaku (Un examen de l’échec des politiques liées à la bulle spéculative).

Autres articles de ce dossier