La vérité sur le sort des minorités sexuelles au Japon

Politique

En août 2015, un étudiant en droit de troisième cycle de l’Université Hitotsubashi de Tokyo s’est donné la mort après que son homosexualité eut été révélée publiquement par l’un de ses camarades. Sa famille a porté plainte contre l’université et contre l’étudiant qui s’est gaussé de lui sur les réseaux sociaux. Cet événement dramatique a révélé à quel point les préjugés et la discrimination envers les minorités sexuelles sont tenaces au Japon, contrairement à ce que la popularité de certaines vedettes transgenres des médias pourrait laisser croire.

Surmonter l’isolement et l’exclusion sociale

À en juger par les exemples de discrimination sous toutes ses formes – depuis les railleries jusqu’aux actes de violence – que je viens de citer, on ne peut pas dire que le Japon est un pays vraiment tolérant à l’égard des minorités sexuelles. La plupart des membres de la communauté LGBT dissimulent leur véritable orientation sexuelle et ils vivent dans la crainte des réactions que susciterait la divulgation de leur secret. Ils bénéficient rarement d’un soutien social, un soutien d’ailleurs pratiquement inexistant. Ils sont souvent confrontés à la solitude et à l’exclusion sociale si bien que les tendances suicidaires sont particulièrement fréquentes parmi eux. On est ainsi en droit de penser que l’étudiant de troisième cycle de l’Université Hitotsubashi dont il a été question au début de cet article a été poussé au suicide par la révélation soudaine au grand jour de son homosexualité et la réaction inappropriée des services universitaires à qui il a demandé conseil.

Les choses sont malgré tout en train de s’améliorer quelque peu. Les autorités de plusieurs localités de l’Archipel ont en effet décidé de reconnaître la relation unissant les couples homosexuels comme l’équivalent d’un mariage et certaines entreprises sont elles aussi en train d’évoluer à cet égard. Ces changements s’inscrivent dans le cadre d’un mouvement social de plus grande envergure qui a l’ambition de faire reconnaître les droits de la communauté LGBT. Lors des élections locales de 2015 et des élections à la Chambre des conseillers de 2016, un nombre croissant de candidats et de partis politiques ont abordé la question de l’amélioration des droits des minorités sexuelles. Par ailleurs, on a tout lieu de penser que la session extraordinaire de la Diète de l’automne 2016 va être l’occasion d’un débat autour d’une loi garantissant les droits de la communauté LGBT. Mais le signe le plus encourageant, c’est que ceux qui sont résolus à se battre contre les préjugés et la discrimination sont de plus en plus nombreux.

Il est bien entendu beaucoup trop tôt pour qu’on puisse se laisser aller à l’optimisme. Mais j’espère que les changements en cours permettront de balayer les malentendus et les préjugés auxquels tant de personnes sont encore attachées et que les Japonais reconnaîtront enfin qu’il y a toujours forcément une proportion de minorités sexuelles dans les entreprises, les établissements scolaires, les communautés locales et les familles. Je souhaite également qu’avec le temps les habitants de l’Archipel finissent par admettre que nous avons tous affaire à des membres de la communauté LGBT dans notre vie quotidienne. Cela contribuera peut-être aussi au repos de l’âme de l’étudiant de troisième cycle qui, l’année dernière, n’a pas trouvé d’autre issue à son désespoir que de se donner la mort.

(D’après un article en japonais du 21 septembre 2016. Photo de titre : la Rainbow Pride de Tokyo, le 8 mai 2016. Ce jour-là, 5 000 personnes appartenant à des minorités sexuelles ou leur apportant leur soutien ont défilé dans les rues du quartier de Shibuya pour demander une plus grande tolérance en ce qui concerne la diversité des modes de vie et de sexualité. Jiji Press.)

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