Athlétisme : un Japonais sous les 10 secondes au 100 m

Culture Tokyo 2020

Tamesue Dai [Profil]

L’étoile montante du sprint japonais, Kiryû Yoshihide, a brisé le mur des 10 secondes en parcourant les 100 mètres en 9 s 87, avec un vent de dos trop fort pour homologuer le temps, malheureusement. L’attente se fait fébrile de voir enfin le record du Japon s’établir officiellement sous les 10 secondes. Tamesue Dai, ancien médaillé de bronze sur 400 m haies aux Championnats du monde commente les capacités de Kiryû.

Gérer le moment de sa condition optimale

Au troisième tour du tournoi de la Diamond League qui a eu lieu dans l’État de l’Oregon aux États-Unis le 30 mai dernier, le Chinois Su Bingtian a couru la disance en 9 s 99, devenant ainsi le premier athlète asiatique à passer la barre symbolique des 10 secondes. Kiryû ne sera donc pas le premier, mais de ce point de vue, le classement n’a pas grande importance. Bien plus importants pour un athlète sont les résultats aux Jeux olympiques une fois tous les quatre ans, et aux Championnats du Monde, tous les deux ans.

C’est sur cet objectif que Kiryû doit fixer son objectif. Nul besoin de le lui rappeler, en fait, il doit bien en avoir conscience. Passer dans la catégorie des sprinters à courir sous les 10 secondes n’est qu’une étape, le véritable objectif est d’être présent à la finale du 100 m lors des JO de Tokyo.

Quand on revoit ses performances jusqu’à ce jour, on s’aperçoit que tous ses records ont été établis en avril et mai. Dans l’avenir, pour ajuster sa préparation aux compétitions les plus importantes, il devra apprendre à gérer le point culminant de sa condition physique.

À 17 ans, Kiryû Yoshihide égalise le record du monde junior, aux éliminatoires du Concours international d’Athlétisme amateur Mikio Oda Memorial (2013).

Autre point capital, dans un événement sportif majeur, pour passer les éliminatoires, la demi-finale et la finale, il faut un réglage ultrafin de ses capacités sur 48 heures. Pour accéder à la finale, il faut courir deux fois « sans se faire éliminer ». Et garder sa meilleure performance pour la troisième course. C’est du management de course : se garder chaud en passant les éliminatoires.

En plus de cela, il y a un mental à acquérir pour gagner une course décisive. Comment sortir le maximum de ses capacités quand la pression du public est énorme. Acquérir des méthodes de mental training est une condition sine qua non, et il faut être passé par toutes les expériences de l’entraînement et de la victoire.

En ce qui concerne son potentiel physique, Kiryû l’a déjà prouvé. Mais les autres réquisitions pour faire tête haute sur la scène mondiale sont encore inconnues. Voilà le défi qu’il doit aborder à l’avenir.

24 ans lors des JO de Tokyo.

Kiryû n’a pas encore 20 ans. Entre les Jeux olympiques et les Championnats du monde, une dizaine de grands rendez-vous l’attendent. Mais on peut regarder les choses à l’envers et se dire qu’il n’aura pas énormément d’occasions d’acquérir de l’expérience. Pour le moment, son objectif principal est les Jeux olympiques de 2020. Il aura 24 ans, le timing idéal. Avant ça, pousser le record du Japon dans les 9 secondes lui apporterait sans aucun doute une indéniable confiance en soi.

Bien entendu, les Jeux olympiques ne sont pas la fin de tout et on peut encore marquer un record après les JO : Asahara Nobuharu, médaille de bronze en relais 4 x 100 m aux JO de Pékin en 2008 a établi son record personnel à 10 s 02 (troisième meilleure performance japonaise de tous les temps sur 100 m.) à 29 ans !

Si Kiryû faisait passer le record du Japon sous la barre des 10 secondes, cela provoquerait sans nul doute un changement de conscience chez les autres athlètes. Je dois dire que j’adorerais voir deux ou trois Japonais sous les 10 secondes d’ici 2020, et les voir se mesurer sur la même ligne que les autres concurrents du monde entier à Tokyo !

(D’après un original en japonais du 26 juin 2015. Photo de titre : Jiji Press, Tokyo, 11 mai 2014.)

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Tamesue DaiArticles de l'auteur

Né en 1978 dans la préfecture d’Hiroshima. Diplômé de l’Université Hôsei. Formé comme sprinter au collège et au lycée, il se consacre au 400 m. haies à l’université. Médaille de bronze aux championnats du monde d’athlétisme en 2005 et premier médaillé japonais dans les disciplines sur piste. Son record du Japon en 47 secondes 89 tient toujours. Il a pris sa retraite en 2012. Actuellement commentateur sportif, il travaille également dans un large éventail d’activités sociales et éducatives. Directeur délégué de l’Athlete Society qui soutient les athlètes dans leur reconversion, et ambassadeur de bonne volonté auprès du Comité olympique du Bhoutan.

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