Quels bénéfices à long terme peut-on attendre des JO de Tokyo ?
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Un nouveau modèle
Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, seules deux villes ont été choisies à deux reprises pour accueillir les Jeux olympiques d’été : Londres (en 1948 et en 2012) et aujourd’hui Tokyo, qui avait déjà eu cet honneur en 1964. Les travaux gigantesques de rénovation urbaine qui ont précédé les Jeux olympiques de 1964 ont coûté mille milliards de yens et doté le pays de nouvelles infrastructures, dont le train à grande vitesse Tôkaidô, le réseau métropolitain de voies express de Tokyo et le monorail de l’aéroport d’Haneda. La préparation de la ville en vue des jeux de 2020 ne nécessitera aucun grand chantier de ce genre. Ce qu’il faudra en revanche, c’est un nouveau modèle prenant en compte les leçons et l’héritage de la première expérience olympique de Tokyo. Le meilleur modèle qu’on puisse envisager devra intégrer le respect de l’environnement et du paysage urbain et la volonté de faire de Tokyo une destination répondant aux aspirations du tourisme international.
À Tokyo, on ne trouve ni bidonville ni friche industrielle en nécessité urgente de rénovation. Nul besoin d’une grande initiative urbaine comme celle qui a débouché sur la construction d’une gigantesque zone commerciale à l’Est de Londres avant les Jeux de 2012. Tokyo est une ville d’un bon niveau de développement, où le plus gros des infrastructures nécessaires est déjà en place. Il est donc improbable qu’on voit s’ouvrir de grands chantiers de travaux publics, hormis ceux qui concernent directement les Jeux olympiques, tels que la construction d’un nouveau stade et celle du village olympique où les athlètes et leurs accompagnateurs séjourneront pendant la durée des jeux.
Le fonctionnement d’une ville arrivée à maturité exige toutefois beaucoup de travail. C’est ainsi que l’enfouissement des lignes électriques et l’enlèvement des poteaux seraient souhaitables pour l’amélioration du paysage. Les voies express et d’autres infrastructures ont elles aussi besoin de travaux d’entretien visant à éviter leur détérioration et à assurer la sécurité des usagers.
Le succès de la candidature de Tokyo offre une occasion idéale pour relancer le débat sur la planification urbaine, qui a piétiné jusqu’ici faute d’objectifs clairs. L’ouverture des jeux d’ici sept ans doit être considérée comme une échéance pour nos efforts d’innovation.
Relancer le tourisme
Quel genre de ville Tokyo doit-elle s’efforcer de devenir ? À titre de référence, prenons l’exemple de Barcelone. Dans la période qui a précédé les Jeux olympiques de 1992, Barcelone s’est embarquée dans une campagne en vue de passer du stade de ville sombre, imprégnée d’histoire médiévale, à celui de capitale du tourisme international, et elle a obtenu de remarquables résultats. Les chiffres fournis par l’industrie hôtelière nous apprennent que Barcelone, qui avait reçu la visite de 3,8 millions de touristes en 1990, en a accueilli 7,78 millions en 2000. Le tourisme étranger a compté pour beaucoup dans cet essor, puisque 68,7 % des visiteurs relevaient de cette catégorie en 2000, contre 48,8 % en 1990. En fait, Barcelone s’est placée en tête de toutes les villes européennes en termes de rapidité de l’expansion du tourisme. Cette réussite a donné naissance à une nouvelle approche de la rénovation urbaine qui est restée connue sous le nom de « modèle de Barcelone ».
Tokyo doit faire un usage similaire de l’opportunité qui lui est offerte pour concevoir un projet pour elle-même et générer un nouvel héritage olympique. Pour l’heure, le dividende olympique qui suscite les plus vives anticipations est la relance du secteur touristique. Il ne fait aucun doute que les jeux vont attirer un grand nombre de visiteurs étrangers. Certes, Tokyo remplit bien son rôle en tant que pôle commercial, mais elle a peu à offrir en termes de sites historiques et autres attractions touristiques. Jusqu’à une date récente, le tourisme passait pour quelque chose de superflu.
À en croire la société d’étude de marché Euromonitor International, 3,82 millions de touristes étrangers ont visité Tokyo en 2010. C’est un chiffre très modeste comparé aux résultats affichés par d’autres grandes villes internationales : 19,97 millions pour Hong Kong, 14,71 millions pour Londres et 8,18 millions pour Paris. Une enquête du gouvernement métropolitain de Tokyo, menée durant l’exercice 2012, a montré que 35,3 % des visiteurs étrangers sont venus à Tokyo pour affaires et 45,1 % pour le tourisme. D’après cette enquête, les destinations les plus populaires ont été les grands quartiers commerciaux tels que Ginza, Shibuya et Shinjuku, où les visiteurs peuvent s’adonner au shopping, à la promenade et à la gastronomie japonaise.
Un tourisme sportif à l’échelle de la nation
Les Jeux olympiques 2020 devraient donc être propices à l’amélioration de l’image de Tokyo et à la relance du tourisme. Il existe deux approches pour amener un plus grand nombre de visiteurs étrangers à Tokyo. La première consiste à renforcer l’attrait de la capitale elle-même en y créant de nouvelles ressources pour le tourisme ; la seconde à faire la promotion du Japon tout entier tout en mettant en exergue l’intérêt de Tokyo en tant que porte d’entrée. En guise de conclusion, qu’on me permette de proposer une idée pour chacune de ces approches.
Un premier pas dans la création de nouvelles ressources pour le tourisme pourrait consister à restaurer une partie de la ville historique. Dans cette perspective, on pourrait reconstruire le Château d’Edo et remplacer l’horrible voie express qui enlaidit actuellement le pont Nihonbashi par un tunnel souterrain moins choquant pour la vue. Peut-être aussi serait-il judicieux d’ouvrir des casinos et de prévoir des mouillages pour les gros navires de croisière. Des plans pour ces projets ont déjà été approuvés.
Outre ces projets de construction, la ville doit mettre sur pied et promouvoir des évènements sportifs susceptibles d’attirer les visiteurs étrangers. Vu la déficience de Tokyo en termes d’attractions historiques, son statut de ville hôte des Jeux olympiques est un atout crucial. Le Japon se doit de mettre à profit ce statut pour établir solidement la réputation de Tokyo en tant que capitale mondiale de la compétition sportive. Pour ce faire, je propose qu’on crée une commission des sports de Tokyo qui puisse servir de cadre organisationnel à la mobilisation des personnes à travers le sport.
Ma seconde proposition tourne autour de l’idée de promotion du tourisme sportif. Il s’agirait d’un programme à l’échelle du pays, avec Tokyo comme porte d’entrée.
Le Japon est riche en ressources naturelles aptes à attirer le tourisme sportif : neige poudreuse à Hokkaido, récifs de corail à Okinawa, couverture forestière sur plus de 60 % du territoire, étendue du littoral — un éventail exceptionnel au niveau mondial de ressources propices aux sports d’extérieur. Petit à petit, nous pourrons mettre en place des lignes aériennes à bon marché qui faciliteront la mobilité des voyageurs. À l’heure des smartphones et de l’information instantanée, les gens peuvent se tenir plus vite que jamais au courant des évènements qui les intéressent.
Ces initiatives devraient nous aider à attirer au Japon les touristes sportifs, notamment en provenance des autres pays asiatiques. Ouvrir un lien ferroviaire direct entre Narita, le principal aéroport international de Tokyo, et Haneda, sa plaque tournante pour les lignes intérieures, faciliterait grandement le transport des visiteurs étrangers.
(D’après l’original éctit en japonais le 1er octobre 2013. Photographie de titre : Nikkan Sports/Aflo)
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