Les problèmes spécifiques du système de l’emploi japonais

Économie Société

Les firmes japonaises ont considérablement réduit le nombre des employés « réguliers » ou « permanents » qu’elles recrutent chaque année et qui deviennent membres à part entière de l’entreprise. Tant et si bien que quantité d’habitants de l’Archipel doivent à présent se contenter d’un emploi « non-régulier », autrement dit « précaire ». Dans cet article, Hamaguchi Keiichirô, spécialiste de la politique de l’emploi, propose l’adoption d’un système d’« emploi régulier basé sur le poste de travail » en parallèle à celui de l’« emploi à vie » fondé sur l’adhésion à la communauté constituée par l’entreprise, qui n’existe qu’au Japon.

Le modèle de l’emploi à vie et les emplois de misère 

Je suis parfaitement conscient des problèmes que je viens d’évoquer, mais je n’en reste pas moins favorable au statut de l’emploi basé sur le poste de travail. Je pense même qu’il devrait, à plus ou moins long terme, devenir la norme pour la majorité des travailleurs japonais.

Le « bon vieux temps » de l’emploi garanti à vie mais sans aucune limite en termes de tâche, de nombre d’heures ou de lieu de travail est révolu. Il correspondait à une époque où il n’y avait le plus souvent qu’un revenu par foyer. Le mari subvenait aux besoins de son épouse et de ses enfants avec son seul salaire, et les femmes au foyer et les étudiants travaillaient à temps partiel pour arrondir les fins de mois. Cela fait déjà près de trente ans que le Japon a adopté la Loi sur l’égalité du droit au travail et il ne pourra pas indéfiniment continuer à s’en remettre à un modèle dépassé.

A l’heure actuelle l’Archipel est confronté à un grave problème social, celui des black kigyô (littéralement « entreprises noires ») qui proposent ni plus ni moins que des emplois de misère. Dans ce type d’entreprise, les employés sont en effet contraints d’effectuer des heures de travail interminables en étant soumis à des pressions physiques et morales constantes. Si ce genre d’abus est possible, c’est à cause du modèle de l’emploi à vie. Les « entreprises noires » appliquent le même principe d’absence de limite en termes de tâche, de nombre d’heures et de lieu de travail qui sont exigées traditionnellement en échange de la garantie de l’emploi à vie. Mais elles n’offrent bien entendu aucune sécurité de l’emploi. Le phénomène des emplois de misère proposés par les « entreprises noires » semble directement lié à l’attachement excessif des travailleurs japonais au modèle de l’emploi à vie au moment où le recrutement des employés permanents a considérablement diminué.

(D’après l’original écrit en japonais le 18 juin 2013)

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