Les jeunes Japonais favorables au retour des femmes au foyer

Société

Honda Yuki [Profil]

D’après une enquête effectuée par le bureau du cabinet du gouvernement en octobre 2012, le nombre des Japonais qui souhaitent que les femmes restent à la maison pendant que leur mari travaille est en augmentation, en particulier chez les jeunes de 20 à 29 ans. Dans les lignes qui suivent, Honda Yuki s’efforce d’analyser ce phénomène.

Deux explications possibles

Étant donné ce qui vient d’être dit, je voudrais proposer deux explications possibles aux résultats de l’enquête du bureau du cabinet du gouvernement d’octobre 2012 en ce qui concerne la tranche d’âge de 20 à 29 ans.

La première hypothèse, c’est qu’il s’agit d’une forme d’atavisme suscitée par le redressement économique de courte durée que le Japon a connu dans les années 2004-2008.

L’augmentation momentanée des propositions d’emploi due à l’embellie économique a entrainé un regain d’intérêt partiel, essentiellement chez les célibataires, des salariés de 20 à 29 ans pour le modèle japonais qui veut que le mari subvienne aux besoins de la famille tandis que l’épouse s’occupe du foyer, modèle qui a prévalu durant la période de la bulle économique des années 1990.

La seconde explication, c’est la préoccupation des parents pour leurs enfants.

Les femmes qui travaillent ont peut-être éprouvé des difficultés à concilier leur vie professionnelle avec les responsabilités familiales, en particulier en ce qui concerne l’éducation des enfants, ce qui a pu les amener à penser qu’il vaut mieux donner la priorité aux enfants en restant à la maison.

Il faut s’attendre à voir cette forme d’atavisme se manifester avec plus ou moins d’intensité au gré des fluctuations de l’économie. En revanche, la préoccupation pour l’éducation des enfants est une constante profondément enracinée dans les mentalités qui va de pair avec l’avenir incertain de la société et l’énorme responsabilité que les ménages japonais assument dans l’éducation de leurs enfants.

Mettre un terme à la division des tâches en fonction du sexe

De tous les pays avancés, le Japon est celui où la division des tâches en fonction du sexe est la plus marquée. D’après le classement en termes de parité des sexes établi par le Forum économique mondial en octobre 2012, il occupe la 101e place sur 135 pays recensés, et il est au dernier rang des pays du G8.

Le Japon a un taux de natalité très bas et sa population est en train de vieillir. Le gouvernement a cherché des solutions pour encourager les femmes à travailler en dehors de la maison et faire face à la diminution de la population en âge de travailler. Mais jusqu’à présent le pays reste dominé par le modèle de la répartition des tâches et des emplois en fonction du sexe et par l’inquiétude des parents pour l’avenir de leurs enfants. Tant que les autorités ne prendront pas les mesures nécessaires pour transformer l’organisation du travail et soulager les familles en transférant la responsabilité de l’éducation des enfants à la société, les Japonais ne pourront pas s’épanouir pleinement ni trouver un équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie privée, et ce quel que soit leur sexe.

Les femmes japonaises ne devraient pas hésiter à travailler sous prétexte qu’elles feraient mieux de se sacrifier pour leurs enfants. Il faut que le Japon se dote le plus rapidement possible d’un système qui permette aussi bien aux hommes qu’aux femmes de choisir sereinement, librement et facilement la vie qu’ils veulent mener.

(D’après un texte original en japonais du 17 février 2013)

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Honda YukiArticles de l'auteur

Née en 1964. Professeur à l’Institut des sciences de l’éducation de l’Université de Tokyo. Auteur de divers ouvrages dont Kyôiku no shokugyôteki igi : wakamono, gakkô, shakai o tsunagu (Le sens de l’éducation en tant que profession : relier les jeunes, l’école et la société) paru en 2009.

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