Les jeunes Japonais favorables au retour des femmes au foyer

Société

Honda Yuki [Profil]

D’après une enquête effectuée par le bureau du cabinet du gouvernement en octobre 2012, le nombre des Japonais qui souhaitent que les femmes restent à la maison pendant que leur mari travaille est en augmentation, en particulier chez les jeunes de 20 à 29 ans. Dans les lignes qui suivent, Honda Yuki s’efforce d’analyser ce phénomène.

Des arguments contestables

Le bureau du cabinet du gouvernement n’a publié qu’un aperçu des résultats de l’enquête de 2012, si bien que pour juger de la pertinence des interprétations que l’on vient de citer, il faut absolument se référer à d’autres sources. C’est ce que je vais tenter de faire, dans la mesure du possible.

En premier lieu, l’idée qui voudrait que le revirement d’opinion mis en lumière par l’enquête soit directement lié à l’importance accrue donnée par les Japonais aux liens familiaux depuis le tremblement de terre du 11 mars 2011 me paraît contestable. En effet, des données antérieures à la catastrophe qui a frappé le Japon il y a deux ans montrent déjà une évolution en faveur du modèle social de la femme au foyer, en particulier chez les jeunes. Depuis 1993, l’Institut national de recherches sur la population et la protection sociale mène, tous les cinq ans, une enquête nationale sur la famille, auprès de femmes mariées. La deuxième et la troisième enquêtes, réalisées respectivement en 1998 et 2003, ont mis en évidence un recul du nombre des personnes interrogées approuvant l’idée que « le mari doit travailler à l’extérieur pendant que l’épouse s’occupe du foyer ». En revanche la quatrième enquête, qui remonte à l’année 2008, montre une progression de ce pourcentage, en particulier dans la tranche d’âge de 20 à 29 ans.

Voyons maintenant ce qu’il en est des arguments de Harada Yôhei et Yamada Masahiro. Le premier invoque le choc Lehman Brothers, en 2008, ainsi que la crise financière mondiale et le ralentissement de l’économie qui en ont résulté. Mais rien ne permet de dire que ces événements ont joué un rôle déterminant dans l’évolution de l’attitude des jeunes. Au Japon, la crise de l’emploi dans cette partie de la population a atteint son point culminant entre 2000 et 2004, à un moment où la conception du mari au travail et de l’épouse à la maison était encore en train de perdre du terrain.

Quant à l’hypothèse de Yamada Masahiro, elle a le défaut de mélanger des questions liées à l’organisation de la vie des hommes et des femmes mariés avec l’idée que les célibataires se font du mariage, y compris le point de vue des femmes et des hommes dans ces deux catégories. Or ce sont des problèmes qui doivent être examinés séparément, en fonction du sexe et de la situation familiale.

Suite > Jeunes en quête de stabilité et inquiétudes parentales

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Honda YukiArticles de l'auteur

Née en 1964. Professeur à l’Institut des sciences de l’éducation de l’Université de Tokyo. Auteur de divers ouvrages dont Kyôiku no shokugyôteki igi : wakamono, gakkô, shakai o tsunagu (Le sens de l’éducation en tant que profession : relier les jeunes, l’école et la société) paru en 2009.

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