Mifune Toshirô : le destin singulier d’un acteur d’envergure mondiale

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Débuts à Hollywood et création de Mifune Productions

Quinze ans après ses débuts, Mifune Toshirô était devenu une star du cinéma japonais. C’est alors qu’on lui a proposé de jouer le rôle principal d’Animas Trujano (1962) du cinéaste mexicain Ismael Rodriguez (1917-2004). Quatre ans plus tard, il a fait ses débuts à Hollywood dans le film Grand Prix, réalisé en 1966 par le cinéaste américain John Frankenheimer (1930-2002).

Mifune Toshirô aux côtés d’Alain Delon, pendant le tournage de Soleil rouge, en 1971. Ce western très original – en raison de son casting éclectique (Charles Bronson, Alain Delon, Mifune Toshirô et Ursula Andress) et de son scénario rocambolesque – a été réalisé par le cinéaste britannique Terence Young (1915-1994).

Mifune Toshirô est ainsi devenu une vedette d’envergure internationale. Mais le succès ne lui est jamais monté à la tête. Il est toujours resté un acteur assidu, consciencieux et très attentif aux autres. C’était aussi un maniaque de la propreté qui n’hésitait pas à mettre la main à la pâte quand cela était nécessaire. Il était plein d’égards pour ceux qui travaillaient derrière la caméra, ce qui lui a valu l’estime et l’affection de tous.

Au moment où la carrière internationale de Mifune Toshirô a commencé, le cinéma japonais a traversé une période de profondes mutations. La télévision s’est généralisée dans les foyers et les spectateurs ont fréquenté les salles obscures avec beaucoup moins d’assiduité. Tant et si bien que l’industrie cinématographique a dû s’adapter. La Tôhô a décidé de fermer ses studios de Kinuta et conseillé à Mifune Toshirô de créer une compagnie de production pour réaliser ses propres films.

C’est ainsi qu’est née Mifune Productions Co. Ltd. qui a produit dès 1963 Gojûman-nin no isan (L’héritage du demi-million de gens), une œuvre réalisée et interprétée par Mifune Toshirô. Ce premier film s’est avéré un échec. Trois ans plus tard, Mifune Productions a ouvert des studios d’une superficie de 6 500 mètres carrés dans le quartier Seijô de l’arrondissement de Setagaya, à Tokyo. La compagnie de cinéma de Mifune Toshirô a dès lors produit une série de grands films, entre autres Rébellion (1967) de Kobayashi Masaki (1916-1996), qui a obtenu le Prix de la Fédération internationale des critiques de films (FIPRESCI) à la Mostra de Venise ; Le Soleil de Kurobe (1968) de Kumai Kei (1930-2007) ; et Furin kazan (1969) d’Inagaki Hiroshi (1905-1980). Mifune Productions semblait promise à un bel avenir.

À gauche : Mifune Toshirô sur le tournage du film Grand Prix réalisé en 1966 par le cinéaste américain John Frankenheimer. À droite : Mifune Toshirô en train de lire un article que lui a consacré le célèbre magazine américain Life.

Scandales, déboires conjugaux et trahison

Si la carrière de Mifune Toshirô était jusque-là une véritable réussite, on ne peut pas en dire autant de sa vie privée qui était en train de sombrer dans un véritable chaos. Au début des années 1970, le penchant excessif de l’acteur pour la boisson et ses infidélités ont eu raison de son mariage. En janvier 1972, sa femme Sachiko, qu’il avait épousée en 1950 et avec laquelle il avait eu deux fils, a quitté le domicile conjugal pour retourner chez ses parents. Et elle a engagé une procédure de divorce avec médiation. Les choses ont traîné pendant cinq ans. Quand le processus de médiation a commencé, Mifune Toshirô s’est mis en ménage avec Kitagawa Mika (1948-), une jeune actrice de près de 30 ans sa cadette, avec l’intention de l’épouser. Sa femme légitime a alors renoncé à divorcer en déclarant qu’elle resterait mariée avec lui jusqu’à la fin de ses jours. Et de fait, elle ne lui a jamais accordé le divorce.

Dans le même temps, Mifune Toshirô a dû faire face a de graves difficultés professionnelles quand son bras droit l’a quitté pour créer une nouvelle compagnie de cinéma en emmenant avec lui la plupart des acteurs de Mifune Productions. Le coup a été terrible pour la maison de production, qui est tombée dans le déclin. Bien que profondément affecté, Mifune Toshirô n’en a rien laissé paraître et il n’a jamais eu un mot de reproche pour ceux qui l’avaient si lâchement abandonné. Mais à ce que l’on raconte, cet homme jusque-là réputé pour son goût pour la plaisanterie et les bons mots est devenu taciturne et il s’est replié sur lui-même.

D’après un ancien employé de Mifune Productions, Mifune Toshirô « a remercié les membres de l’équipe de l’éclairage et du son de la Tôhô qui lui étaient restés fidèles en leur confiant des postes de direction dans son entreprise si bien que la gestion de Mifune Productions est désormais partie à vau-l’eau. En fait, son sens aigu du devoir l’a mené à la catastrophe ».

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