L’économie japonaise aborde un tournant décisif

Économie

Une croissance de 2 % est-elle envisageable ?

L’économie japonaise, nous venons de le voir, comporte des aspects positifs et des aspects négatifs, et le taux de croissance constitue l’un des facteurs clés de l’orientation qu’elle prendra. Les Abenomics visent une croissance forte, qui aurait un impact significatif sur le processus de redressement des finances publiques.

Mais si l’on se réfère à la croissance passée pour le calculer, le taux potentiel de croissance économique n’est pas tellement élevé. La diminution rapide de la population active va elle aussi constituer un obstacle majeur à la croissance soutenue de l’économie japonaise. À moins d’une hausse considérable de la productivité du travail et de la productivité totale des facteurs, l’objectif de croissance de 2 % ne sera pas facile à atteindre au Japon.

Toutefois, tabler sur la difficulté de la croissance rapide ne facilitera pas le redressement économique. Tel est le point de vue de bien des membres du gouvernement Abe. L’importance que ce gouvernement accorde aux stratégies de croissance reflète sa volonté de parvenir par tous les moyens à une forte croissance économique.

La stagnation séculaire de l’économie japonaise

L’hypothèse de la stagnation séculaire formulée par Lawrence Summers, professeur à l’Université Harvard, offre un point de vue utile à la réflexion sur les perspectives de croissance de l’économie japonaise. Selon cette hypothèse, le taux de croissance d’une économie est grandement influencé par ses antécédents macro-économiques. Contrairement à la tendance à supposer que le taux de croissance à long terme est déterminé par l’offre, Summers soutient que l’évolution antérieure de la demande influence le taux de croissance à moyen terme, du fait des séquelles de l’hystérésis.

Cette hypothèse semble s’appliquer à l’économie japonaise. Le Japon souffre de stagnation macro-économique depuis deux décennies. Au cours de cette période, l’éclatement d’une bulle spéculative a laissé place à des ajustements financiers dans tous les secteurs de l’économie, avec quelques excès dans des domaines comme l’emploi, la dette et les immobilisations. Dans le même temps, le pays a subi une crise financière et une déflation persistante. Si l’on se fie à l’hypothèse de la stagnation séculaire, c’est ce genre de marasme qui explique la faiblesse du taux de croissance de l’économie japonaise. Dans la même logique, si l’économie continuait de se redresser, peut-être serait-on en droit d’espérer une certaine augmentation du taux de croissance.

Pour expliquer cette situation aux étudiants, je leur demande souvent d’imaginer un grand magasin. Toute baisse de la fréquentation se traduit naturellement par un déclin de la productivité du magasin. Si en revanche les clients reviennent au magasin, la productivité augmente peu à peu. Si la clientèle continue de s’accroître, le magasin transférera des employés et de l’espace de vente des zones de faible productivité vers les zones de forte productivité et, au-delà d’un certain seuil, le magasin envisagera d’accroître sa surface de vente.

L’économie japonaise se trouve dans une situation similaire. La croissance de la productivité totale des facteurs a nettement ralenti dans la période consécutive à l’éclatement de la bulle spéculative. Or il est clair que ce phénomène est lié au déclin de la demande. Va-t-il se perpétuer, alors que la croissance de la productivité totale des facteurs reste faible ?

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