Le Japonais qui a autopsié Marilyn Monroe

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Yamada Toshihiro [Profil]

L’autopsie de Robert Kennedy

L’assassinat de Robert Kennedy (photo : Aflo)

Quel terrible hasard.

Nous sommes le 5 juin 1968, il est une heure du matin. Le téléphone de Thomas Noguchi sonne. L’appel le réveille, et il a du mal à en croire ses oreilles : Robert Kennedy prononçait un discours à l’hôtel Ambassador lorsqu’il a été atteint de plusieurs balles à la tête. Il est mort à l’hôpital, quelques heures après son transfert. La police a arrêté en flagrant délit un Américain d’origine palestinienne, Sirhan Sirhan.

Il est normal que l’autopsie revienne au bureau médico-légal de Los Angeles, le crime ayant été commis dans sa circonscription. Mais la victime est l’un des membres de la famille Kennedy, au cœur de la scène politique américaine, et candidat à la présidence. Les hauts fonctionnaires de Washington, abusant de leur pouvoir, ont alors tendance à mépriser les lois et coutumes locales. Avec des hommes politiques locaux à leur solde, ils règnent en maître.

Le clan Kennedy a tenté de faire immédiatement transporter la dépouille de Robert vers la capitale, Washington DC. Cependant, le sort du suspect n’est pas fixé tant que la condamnation n’a pas été prononcée. Et pour réunir les preuves de sa culpabilité, une autopsie est indispensable, mais le bureau médico-légal a ici affaire à la toute-puissante famille Kennedy. Thomas Noguchi parvient tant bien que mal à vaincre les réticences du clan Kennedy et effectue l’autopsie à Los Angeles. Elle dure six heures et demie.

Cette autopsie sera louée par les médecins légistes et les pathologistes du monde entier. M. Noguchi acquiert alors, à juste titre, une renommée mondiale.

« Le maître de l’autopsie »

Le travail et les déclarations de Thomas Noguchi, l’homme qui a recueilli « l’ultime soupir » des dépouilles de Marilyn Monroe et de Robert Kennedy, gravant ainsi son nom dans l’histoire des Etats-Unis, suscitent toujours la curiosité du public. Précisons qu’au mois de mars de cette année, on a encore vu dans les médias américains des titres proclamant que « John avait demandé à Robert de se débarrasser de Marilyn pour cacher sa liaison avec deux Kennedy ».

Thomas Noguchi lorsqu’il était professeur à l’université de Californie du Sud (photo : collection de l’auteur)

Thomas Noguchi, aujourd’hui âgé de 87 ans, est toujours un scientifique actif. En tant que directeur honoraire du bureau médico-légal de Los Angeles et professeur émérite de l’Université de Californie du Sud, il se consacre à la formation des jeunes et participe aussi à des rencontres internationales dans le monde entier. Il donne également de nombreuses conférences, faisant preuve d’une vitalité sans limites.

Enfin, depuis quelque temps, il travaille à des recherches sur l’éthique de l’autopsie et du travail du médecin légiste pour une université de troisième cycle, où il formalise ses travaux. Et il répète souvent qu’il ne se contentera pas de vivre jusqu’à 100 ans, mais qu’il continuera à travailler jusqu’au bout. Son dynamisme est inépuisable.

(D’après l’original paru en japonais le 25 juin 2014)

Bibliographie : Les dossiers du médecin légiste de Hollywood : le testament de Thomas Noguchi (Shinchôsha), par Yamada Toshihiro

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Yamada ToshihiroArticles de l'auteur

Journaliste et éditeur chez Kodansha, Reuters puis Newsweek, reporter spécialisé sur les questions internationales et les phénomènes de société. Traducteur en japonais de Comment truquer un match de foot de Declan Hill (Kôdansha) et auteur de Monster, les manœuvres du prochain Al-Qaïda (Chûô Kôron Shinsha) et des Dossiers du médecin légiste de Hollywood : le testament de Thomas Noguchi (Shinchôsha).

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