Le transfert du marché de Tsukiji fait l’objet d’une incertitude croissante

Politique Tokyo 2020

Kawamoto Daigo [Profil]

Suite à la décision, prise par Koike Yuriko, la gouverneur de Tokyo récemment élue, d’interrompre le transfert, prévu depuis longtemps, du marché de Tsukiji à Toyosu, on s’est aperçu que la couche de sol propre prévue sur le site de la nouvelle installation n’avait jamais été posée et que les taux de substances toxiques contenues dans les eaux de la nappe phréatique étaient supérieurs aux niveaux acceptés. Les entreprises dépendantes de Tsukiji sont dans l’incertitude la plus totale en ce qui concerne aussi bien la tenue du transfert que sa date éventuelle.

Personne à blâmer ?

L’absence de la terre, élément essentiel du projet de transfert, est déconcertante. L’approche choisie par les autorités métropolitaines est celle qui lui a été conseillée par un comité d’experts, et les informations sur le projet ont été communiquées au public via divers canaux, dont le site Internet du gouvernement de Tokyo. Elles ont également figurées dans le rapport d’évaluation environnementale rédigé avant le lancement des travaux de construction.

Pour aggraver encore le problème, on a trouvé jusqu’à 20 centimètres d’eau dans le sous-sol des édifices où l’apport de terre n’avait pas eu lieu. Certes, il s’est avéré jusqu’ici que les taux de substances toxiques contenues dans cette eau restaient en deçà des seuils acceptés et les responsables expliquent que les systèmes de drainage et la surveillance régulière de la nappe phréatique seront intégrés dans la conception des sous-sols, mais ces mesures laissent de côté une question plus importante, celle de l’identité des responsables de l’absence de la couche de sol propre qui, en premier lieu, aurait due être apportée, conformément aux recommandations des experts. La plupart des personnes qui ont été à la tête du marché de vente en gros au cours de ces dernières années déclarent qu’elles n’étaient pas au courant du changement de plan.

La gouverneur a fortement critiqué ce fiasco, qu’elle a imputé à une carence systémique inexplicable. Elle s’est engagée à remuer ciel et terre pour aller jusqu’au fond du problème, mais la mauvaise communication chronique qui règne au sein du gouvernement métropolitain fait qu’il est peu probable que la vérité apparaisse au grand jour.

Des appels à tout laisser tomber

Les entreprises de Tsukiji, qui sont sur des charbons ardents depuis le début du fiasco, doutent de plus en plus de l’aptitude du gouvernement à garantir la salubrité du site de Toyosu. Les résultats des huit séries d’analyses publiés le 29 septembre dernier n’ont fait qu’exacerber cette méfiance en révélant que les niveaux de benzène et d’arsenic étaient passés au-dessus des seuils acceptés.

Les marchands de produits de la mer et les grossistes s’inquiètent à juste titre de l’impact que cette situation aura sur leurs résultats financiers. Beaucoup ont dit qu’ils redoutaient que, même si le nouveau site est déclaré sûr, ce qui n’est nullement acquis, il y a de fortes chances que le public se méfie des produits de la mer venant du marché.

À mesure que la situation empire, les membres de l’Assemblée métropolitaine de Tokyo appartenant au Parti communiste ont été les premiers à réclamer l’abandon du projet de transfert. Ils ont été rejoints par un certain nombre de groupes de l’opposition, qui demandent au gouvernement de remettre à l’ordre du jour un ancien projet de rénovation du marché de Tsukiji.

Personne n’aurait pu prévoir qu’un projet pour lequel le soutien des personnes concernées avait été si difficile à gagner se heurterait à un tel obstacle quelques mois avant son achèvement. Alors même que l’issue reste en suspens, les affaires continueront comme à l’ordinaire à Tsukiji. Sans doute Mme Koike respectera-t-elle sa promesse électorale d’accorder la priorité aux Tokyoïtes, mais on est en droit de penser que les répercussions de sa décision se feront sentir dans les ports de pêche d’un bout à l’autre du pays et qu’elle aura un fort impact sur tout le secteur des produits de la mer.

(D’après un original en japonais publié le 3 octobre 2016. Photo de titre : la gouverneur de Tokyo Koike Yuriko en visite au marché de Tsukij, le 16 août 2016. Jiji Press)

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Kawamoto DaigoArticles de l'auteur

Chef du département qui couvre la pêche à Jiji Press. Né à Tokyo en 1967. Diplômé de l’Université Senshû, il a rejoint Jiji en 1991. Suit le dossier du marché de Tsukiji depuis 25 ans. Auteur de Repo : the Tsukiji (Le marché de Tsukiji vu de l’intérieur).

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